Le premier cri
Les mois passant,
Mes plumes
Du croupion
Prenaient volume
Et jolies courbures.
Le rouge et le noir
S’y mêlaient bien.
Un beau matin,
Fier de mes
Nouveaux apparats
Stendhaliens,
Surpris
De ma nouvelle
Prestance,
Tendant le cou
A la lune
Couchante,
Je poussai
Trop haut
Mon premier
Cocorico.
Au fait,
Il s’agissait
D’un petit cri
Qui faisait
A peu près ceci :
Muuuuuunch.
Aussitôt,
Me fît
Tout petit
Cherchant
Par un tour de cou
A 360 degrés
Le coq en chef,
Qui par ma hardiesse
Serait certainement vexé.
Mais rien !
Le pacha
Enfoui dans le foin
Blotti entre
Quatre poules
Savourait encore
Le souvenir
De sa nuit
De stupre.
Me reprenant,
Les plumes
En nage,
Je rentrai
Dans ma cage.
Il fût
Une demi-heure
Pour que le titulaire
Montât sur le tas
Pour pousser
Le cocorico
Qui fît échos
Et réveilla
Toute la maisonnée.
Je gagnais
A me faire
Plus petit
Que je ne suis.
Pour sûr,
L’ire du coq
Me serait fatale,
Me conduirait
A l’exil.
Un peu plus tard,
Un coquelet
A peine
Plus âgé
Que moi,
S’approcha.
Suis-moi
Dit-il
D’un ton péremptoire.
Le chef veut
Te voir.
Sans mot dire
Je le suivis
Sentant sous
Mon duvet
La sueur
Perler.
Que me voulait-il ?
Avait-il entendu
Mon cri enhardi ?
Approche petit
Me dit-il
De sa voix
Grave et suave.
Je ne te veux
Point de mal.
On me dit,
Enfin,
Il se dit
Que ce matin,
Une demi-heure
Avant l’heure,
Tu aurais
Poussé un cri ?
Sais-tu que
C’est interdit ?
Que seul
Un coq éprouvé
Comme moi
A ce droit ?
Mais pour qui donc
Te prends-tu ?
Une telle
Effronterie,
Vaut bien
Un châtiment
Pour t’apprendre
Qui commande
Vraiment !
Mais je suis d’humeur
Clémente.
Un simple acte
De contrition me suffira
Pour cette fois.
Regardant
Mes frêles pattes
Tortillant la droite
Sur mon premier
Doigt,
Je murmurai
Dans mon patois
Que je ne le ferais plus,
Baissant la tête
Sous le genou.
Content de
Ma soumission,
Il partît
D’un grand éclat
De rire.
Tu me rappelles
Moi, à ton âge !
Et m’enveloppant
De son aile gauche
Il m’emmena
Au fond
Du poulailler.
Là où il m’était
Interdit
D’aller.
Vois-tu
Ces poules
Jeune freluquet ?
Elles sont toutes
Mes dévouées
Et servantes
Chaque fois que bon
Me semble !
Quand tu en auras
Autant que moi
D’aussi belles et
Biens pleines,
Tu pourras
Rivaliser
Mais avant cela
Tu dois
M’obéir
A l’ergot
Et à l’œil.
J’appris
La leçon :
Un coquelet
N’est point coq
Et avoir
De l’ambition
Ne prive pas
De prendre
Patience
Et conseils.